J'entre dans la salle, le monde se rue sur le catalogue, le prospectus qui dira tout de chaque toile, qui fouille la vie, l'intimité de l'artiste pour expliquer le pourquoi du comment.
Et moi, moi j'entre, je balaie du regard, puis je m'arrête devant la première toile qui m'attire... et je ressens, j'observe, je m'approche, religieusement, comme si je faisais connaissance avec un animal farouche, je ferme les yeux et je me laisse envahir par les émotions, les idées. Je rouvre les yeux, je les sens humides, je recule, je remercie.
Je m'isole un peu, puis je passe à la suivante qui m'attireras, j'en saute sûrement pas mal, celles qui ne me font rien ressentir, ou pas autant, mais je n'ai pas le sentiment de perdre quoi que ce soit.
Je ne sais rien de cet oeuvre, ni des suivantes, je ne sais rien de leur père, de sa vie, de ses tourments, mais j'ai ressenti tout, souffrance, joie, j'ai ressenti et l'ai marqué au plus profond de moi.
Pendant ce temps, le monde se sera délecté du pourquoi du comment de chaque coup de pinceau, de chaque choix pictural, sur la signification donné par un expert 30 ans après la mort de l'auteur au choix des matières.
De retour, quand j'annonce que j'ai été visité tel ou tel expo, on me parle de tout cela, et moi, je ne sais rien, je n'ai fait que ressentir, que vivre cette expo.